Speed-dating – lunch chez Stéphane Décotterd

Top chrono à Glion: servis en 90 minutes, les nouveaux lunchs de la Maison Décotterd sont irrésistibles.

DE L’ESTRAGON AU LIEU D’AGRUMES

A la 47ème minute, je suis tombé amoureux d’une tranche de féra pochée dont la chair se détache en lamelles, servie avec un salsifis en croûte et du beurre blanc, le tout parfumé de gouttes d’huile d’estragon idéalement dosées. «Comme je cuisine presque sans agrumes, j’aime tirer parti de l’acidité anisée de l’estragon», explique le chef Stéphane Décotterd. On apprécie d’autant plus que la petite casserole en cuivre reste sur la table, histoire de pouvoir se resservir.

 

DÉJEUNER RAPIDE

Il y a quelques semaines, Stéphane Décotterd lançait son menu d’amuse-bouche. Dans son restaurant de Glion, où la vue sur Montreux et le lac Léman est à couper le souffle, il s’explique: «Jusqu’à présent, il n’y avait qu’un business lunch plutôt court et le menu dégustation, alors j’ai pensé proposer une troisième option». Car au déjeuner les habitudes de consommation ont changé. Cinq fois par an, cette nouvelle offre sera adaptée à la saison et le chef promet de la servir en 90 minutes. Réaliste? Nous avons testé pour vous.

 

DU BLANC POUR SE DÉTENDRE

Le déjeuner commence à midi pile avec un verre de Saint-Saphorin bien frais, histoire de détendre l’atmosphère. Il est accompagné des premières bouchées à déguster avec les mains qui répondent idéalement au vin: une tartelette croustillante à la crème de chou-fleur, roquette et câpres frites; une boulette de pâte à choux au safran fourrée à la moutarde de Bénichon; un biscuit à deux étages à la crème double de gruyère et au fromage.

AIMEZ-VOUS LE COOL-JAZZ?

À 12h20, une tranche de pain et du beurre salé arrivent sur la table sans trop de fioritures. Mais que peut-on demander de plus quand la croûte du pain est si croustillante et le beurre si savoureux? Un autre fond sonore que «Hunting high and low» d’A-ha en version jazz cool, peut-être?

FRISSONS DE PLAISIR

Après une délicieuse entrée en matière de tartare de truite à la crème de cresson et capucine, arrive la deuxième entrée. Il est 12h37. Bien qu’elle soit froide, j’ai chaud et des frissons de plaisir devant un tartare de crevettes crues au cresson, recouvert d’une gelée de betteraves. Un peu de yaourt maintient les arômes iodés et frais.

RIS DE VEAU ET CŒUR DE LAITUE

Après la féra, puis un ravioli fourré à la truffe et au séné, le plaisir de la dégustation est intact. Mais je commence à m’inquiéter pour le timing. Est-ce qu’un plat principal et un dessert peuvent encore arriver sans stress ? Voici un verre de merlot, également de la région, accompagnant une assiette en forme de bateau: ris de veau rôti et gnocchi verts, s’y rencontrent avec des feuilles de cœur de laitue et de la crème verte. Verte? Oui, car la sauge est l’une des autres herbes préférées de Décotterd en hiver.

 

DU CAVIAR POUR LA FIN

Le speed-dating en est maintenant à ses dernières minutes et mes joues commencent à rosir. Mais à 13h31, le dessert de Christophe Loeffel («Pâtissier de l’année» 2021) arrive sur la table, dans les temps. Servi dans une boîte de caviar, le caviar de cacao et la ganache au chocolat cachent des morceaux de poire marinés et un biscuit.

 

JE VEUX LE REVOIR

Qu’il faille ensuite consacrer quelques minutes de plus pour ponctuer  cette rencontre enchanteresse de midi d’un café et de mignardises, personne n’y verra sans doute à redire. En tous les cas, moi, j’espère avoir le plaisir d’une nouvelle visite chez Stéphane Décotterd très bientôt!

 

www.maisondecotterd.com

 

Texte : GaultMillau Suisse

Mérite Culinaire Suisse

DES TALENTS DISCRETS

En Suisse romande, ils font partie de ces artisans hors-pair qui pratiquent leur art sans faire de vagues et qui tutoient l’excellence depuis des années. Les cuisiniers Franck Reynaud et Pierrick Suter, ainsi que le chocolatier David Pasquiet, ont désormais un autre point commun: lundi à Berne, ils ont reçu un Mérite culinaire suisse. Un chocolatier? Oui, car après trois ans à valoriser les cheffes et chefs de cuisine, la Fondation pour la Promotion du goût, qui chapeaute ce prix honorifique, a «décidé d’étendre sa reconnaissance d’excellence en honorant également le métier de pâtissier-confiseur». Le chocolat, symbole helvétique par excellence, était alors inévitable! Nouveaux membres du jury, la pâtissière Felicia Ludwig (Pâtissière de l’année 2022 et Patrick Bovon ont reçu d’emblée un Mérite culinaire.

L’AVANT-GARDE ALÉMANIQUE PRIMÉE

Présents au Bellevue à Berne pour la remise des prix et l’allocution du conseiller fédéral Guy Parmelin, Franck Reynaud et Pierrick Suter ne cachaient pas leur joie: «C’est un vrai plaisir de recevoir un tel prix, qui est une reconnaissance nationale par nos pairs», estime le chef de Lucens. De l’autre côté de la Sarine, ce sont Silvia Manser et Dominik Hartmann qui décrochent un Mérite. La cheffe du Truube, à Gais (AI), et le jeune talent du Magdalena, à Rickenbach (SZ), affichent tous deux 17 points et ont fait la différence grâce à leur modernité et leur audace. Le second, venu recevoir son prix avec sa toute jeune fille, étant même devenu, l’automne dernier, le premier chef dans nos pages à proposer une cuisine entièrement végétalienne.

GÉRARD RABAEY HONORÉ

Côté sucré, si David Pasquiet «caracole dans le top 10 des meilleurs chocolatiers du monde» selon le jury national, l’artisan tessinois Giuseppe Piffaretti (La Bottega del Fornaio, Mendrisio) «continue d’impressionner par sa constance, son professionnalisme et sa capacité à transmettre». Celui que tout le Tessin surnomme «Mastro Piff» se réjouit de faire découvrir la pâtisserie de sa région aux épicuriens qui passeront un week-end dans le canton italophone. Lors de cette quatrième édition du Mérite culinaire, un hommage a été rendu à Gérard Rabaey, ancien chef du Pont de Brent (ex-19/20 et 3* Michelin) à la retraite depuis 2011. Tout sourire et «heureux de voir la gastronomie suisse être aussi dynamique», le double Cuisinier de l’année (1989 et 2004) décroche un Mérite culinaire d’honneur, reconnaissance du jury envers «l’un des pères fondateurs de la grande gastronomie moderne en Suisse».

 

www.meriteculinaire.ch

 

Texte : GaultMillau Suisse

Benoît Carcenat est le «Cuisinier de l’année»

 

FORMÉ À CRISSIER, ÉCRITURE PERSONNELLE 

On reconnaît un M.O.F. (Meilleurs Ouvrier de France) au premier coup d’œil à leur blouse de cuisinier dont le col porte les couleurs du drapeau tricolore. Benoît Carcenat est l’un d’eux. Mais c’est en Suisse qu’il a fait carrière. D’abord, à l’«Hôtel de Ville» de Crissier, encouragé et soutenu par Benoît Violier, d’où son surnom de «Benoît II». Marqué par ce passager, Carcenat n’a pas pour autant cherché à faire du Valrose à Rougemont un Crissier. II y a développé sa propre signature, inoubliable. Le rédacteur en chef de GaultMillau Suisse, Urs Heller précise: «J’y ai envoyé trois testeurs différents: tous partagent le même enthousiasme».

DÉCOUVREZ LE CUISINIER DE L’ANNÉE EN QUESTIONS-RÉPONSES :

BENOÎT CARCENAT, FÉLICITATIONS POUR LE TITRE DE «CUISINIER DE L’ANNÉE» 2023!

C’est incroyable! Je suis très heureux que le GaultMillau récompense pour notre travail après si peu de temps. Depuis que je suis arrivé en Suisse, il y a une vingtaine d’années, je ne manque jamais cette remise de prix. Que cet honneur nous revienne aujourd’hui, alors que nous ne travaillons à Rougemont que depuis environ un an, c’est vraiment fabuleux. Et le titre de «Cuisinier de l’année» me revient certes, mais c’est la reconnaissance du travail de toute une équipe et de la mise en œuvre d’innombrables idées par de nombreuses personnes.

ÉTIEZ-VOUS NERVEUX AVANT LA REMISE DES PRIX ?

Non, pourquoi serais-je nerveux? Par contre cela m’a beaucoup ému.

Y A-T-IL QUELQUE CHOSE QUI VOUS REND NERVEUX ?

Je suis un peu plus nerveux lorsque nous changeons de menu – jusqu’à ce que nous soyons sûrs que tout fonctionne comme je l’avais imaginé.

COMMENT LES VILLAGEOIS DE ROUGEMONT ONT-ILS RÉAGI LORSQUE VOUS AVEZ COMMENCÉ À TRAVAILLER AU VALROSE EN 2021 ?

Au début, il y avait beaucoup de questions: qui est-ce? Que fait-il ici? Est-ce qu’on peut toujours boire un café au Valrose ou est-ce que ça va devenir une adresse exclusive? Il y avait une certaine méfiance. Aujourd’hui, la clientèle est rassurée et heureuse que nous continuions à tenir le café à côté du restaurant gastronomique.

VOTRE CUISINE VA-T-ELLE CHANGER MAINTENANT?

Absolument pas! Les plats seront peut-être un peu plus raffinés, mais je continuerai à faire exactement la même chose. Après tout, c’est pour cela que j’ai été récompensé.

Texte : GaultMillau Suisse

Les cochons noirs des Alpes de Lisi Lisibach

HEUREUX COCHONS DU VILLAGE

Il faut avoir de bons amis ! Bernadette Lisibach (“Neue Blumenau”, Lömmenschwil SG, 17 points) a deux collègues qui élèvent des porcs noirs alpins à titre de loisir, pour ainsi dire devant la porte de son restaurant. “J’ai été impressionné par la manière dont ces cochons grandissent. Ils passent leur temps dehors, ont beaucoup d’espace, pas de médicaments et pas de stress”. Elle fixe donc trois jours de Metzgete dans son sympathique restaurant en pleine campagne, du 26 au 29 octobre. Réservez à temps !

LE TEST EST RÉUSSI ! 

Une grande cuisinière comme Bernadette Lisibach ne laisse rien au hasard. Elle a donc déjà testé la viande de ses cochons noirs des Alpes. Le verdict de la professionnelle : “Ça ne suce pas ! La viande est uniformément marbrée, elle croque bien, sa consistance est ferme et son goût est âpre. On sent que les truies vivent dans les prés et mangent suffisamment d’herbes”. La cheffe des Grandes Tables n’a pas peur du contact : “J’ai déjà participé à une Hofmetzgete. C’était très intéressant. Mais cette fois, je laisse le travail à notre boucher”.

DES PETITS BOUTS, DES PETITES QUEUES, DES PETITES FILLES

La carte semble prometteuse, on y sert de petites portions “pour que l’on puisse savourer de nombreux plats”. Les classiques ne manquent pas : boudin noir, saucisse de foie, lard fumé, côtelettes, langue, boulettes salées. Et deux sortes de saucisses pour les “avancés” : Schnörli et Schwänzli ! Les soupes sont elles aussi entièrement axées sur le thème de la charcuterie : Des boulettes de viande dans la soupe de semoule grillée, de la poitrine de porc croustillante dans la soupe à la mousse de bière.

LES CONSEILS DE LA PATRONNE : FOIE & JARRET !

Une boucherie pas comme les autres. Au “Neue Blumenau”, on trouve aussi de l’émincé avec des röstis, des bäggli braisés au Pinot noir, du cordon bleu avec une salade de pommes de terre, du ragoût avec du maïs Ribel ou du rôti de croûte avec un gratin de pommes de terre. Les recommandations de la cheffe : “J’aime le foie sauté avec des lentilles acides, le jarret rôti aux herbes ou quelque chose de très simple : des ghackets avec des cornettes”.

Tiré de GaultMillau.ch